Spitzberg – Texas Bar 2010

Aujourd’hui, première véritable étape de notre périple. Objectif : le glacier du 14 juillet (rive sud-est de la baie de la Croix). Démontage du camp, embarquement du matériel dans les kayaks (finalement, en mettant chaque chose à sa place, tout rentre !), et c’est parti.

Les premières heures se passent tranquillement en longeant la côte. Il fait gris, mais la mer est très calme et nous sommes à l’abri du vent. La côte est une succession de petites criques avec parfois de hautes falaises. Quelques glaçons dérivent au milieu de la baie.

Le glacier du 14 juillet étant sur l’autre rive du fjord, il nous faut bientôt quitter la berge et traverser le fjord. Il y a un peu de vent et quelques vagues viennent heurter les kayaks, mais cela reste tout à fait gérable. Nous arrivons sans problèmes en face, au niveau d’une falaise où nichent de nombreux Guillemots de Brünnich et quelques Macareux.

Nous débarquons après environ 5h de navigation sur une presqu’île formée par une moraine juste en face du glacier. Nous installons notre deuxième camp à l’abri derrière une butte. Depuis le point le plus haut, nous avons une vue à 360 degrés sur la glacier et ses environs, c’est magnifique ! (et pratique pour surveiller pendant les tours de garde).

Au programme aujourd’hui, première balade tranquille en kayak pour se familiariser avec leur maniement. Nous restons au même endroit ce soir donc pas besoin de démonter le camp.

Après quelques minutes de cours théorique, nous enfilons nos tenues de pingouins et embarquons pour la première fois sur nos « bélougas ». C’est parti, avec un superbe soleil en prime ! Les 5 kayaks du groupe avancent par la rive ouest du fjord vers le « Lilliehöökbreen », le glacier qui forme le fond de la baie de la Croix. Nous croisons un petit troupeau de Bernaches nonnettes ainsi que des Eiders à duvet. Le Goéland bourgmestre n’est jamais loin et guette d’éventuels poussins d’Eider à gober.

Nous naviguons entre des glaçons bleus et blancs de toutes tailles qui crépitent et claquent en fondant tout autour de nous. Le glacier émet parfois un grondement sourd à mesure qu’il avance et nous pouvons voir plusieurs fois des blocs de glace s’écrouler dans l’eau. C’est absolument magnifique !

Les guillemots et les fulmars sont partout et passent souvent très près des kayaks. Un gros phoque barbu nous observe de loin, sortant juste la tête de l’eau. Le soleil est radieux et nous avons presque trop chaud dans nos combinaisons ! Nous revenons au camp après environ 5 heures de navigation, très heureux de cette première expérience. Le premier Macareux moine du voyage nous accueille, ainsi qu’un vol de 5 Plongeons catmarins.

Tout le monde se retrouve sous la tente mess pour le repas du soir, puis regagne sa tente en attendant le tour de garde.

Après le petit déjeuner, départ pour le port afin de charger le matériel et les kayaks sur le bateau qui nous emmènera jusqu’au point de départ de notre expédition. Le « Farm » est un petit bateau de 15 m spécialisé dans le transport de personnes. Pas facile de faire tenir 5 kayaks sur le pont ! Le monoplace finit par se retrouver sur le toit de la cabine, faute de pouvoir le caser ailleurs.

Finalement tout est embarqué et le Farm quitte Longyearbyen vers 11h, pour 13h de voyage. Voilà, c’est parti, retour dans 18 jours.

A l’affût sur le pont avec nos jumelles, nous faisons nos premières observations ornithologiques le temps de sortir de l’Isfjord : Guillemot à miroir, Guillemot de Brünnich, Fulmar boréal, Mergule nain, Macareux moine, Goéland bourgmestre, Mouette tridactyle, Eider à duvet. Mais le bateau bouge quand même bien et je sens rapidement qu’il est plus prudent de rester tranquille dans la cabine.

A mi-chemin, Pierre et Jacques descendent en zodiac déposer la moitié des réserves de nourriture au niveau d’une base scientifique polonaise. Le bateau repart et vient l’explication des consignes de sécurité vis-à-vis du seigneur des lieux : l’ours polaire. Pierre nous montre le maniement des « stylos-pétards », que chaque membre du groupe portera en permanence, ainsi que celui du pistolet d’alarme, et nous explique le fonctionnement des tours de garde que nous ferons chaque « nuit ».

Le voyage se poursuit tant bien que mal pour les sensibles au mal de mer, alors que les autres dégustent un cassoulet ! Quelques heures plus tard nous entrons dans la baie de la Croix (Krossfjorden), le soleil brille et la lumière est magnifique. Il est minuit et nous sortons les lunettes de soleil !

L’emplacement du camp choisit dans une petite baie sur la rive ouest du fjord (Lilliehöökfjorden), vient le déchargement du matériel et le montage du premier campement. Nous apprenons les gestes que nous aurons à faire à chaque déplacement du camp : le montage de la tente mess, le rassemblement du « mobilier » (les bancs et la table pour le réchaud), le montage des tentes, le remplissage des vaches à eau. Tout cela deviendra bien vite automatique !

Le Farm repart… nous voilà seuls pour 18 jours.

Le premier repas pris sous la tente mess, chacun regagne sa tente pour la première « nuit » au milieu de l’arctique. Il est près de 4h du matin et le soleil brille toujours. Notre tente est ce soir en n°4 pour les tours de garde et nous effectuons chacun notre premier tour d’1h avec pour seuls bruits les vagues et les cris de la colonie de Mouettes tridactyles en face de notre camp.

Nous retrouvons le groupe à 9h30 pour un petit déjeuner typiquement norvégien : céréales, pain, confitures, café… mais aussi oeufs, jambon, charcuterie, fromage, crudités, de quoi tenir une bonne partie de la journée ! Au programme aujourd’hui : préparation du matériel pour le départ en bateau prévu le lendemain à 10h.

Tout commence par la vérification de nos équipements personnels : veste, pantalons, vêtements thermiques. Pierre nous conseille d’ajouter à notre panoplie un T-shirt thermique « arctique » introuvable en France, mais le reste est bon, ouf !

Pierre présente ensuite l’itinéraire de l’expédition. Tous n’étant pas des kayakistes aguerris (nous les premiers !), le départ ne se fera pas de la baie de la Madeleine comme initialement prévu, mais de la baie de la Croix, un peu plus au sud. Cela permettra de faire un peu plus de navigation près des glaciers et de garder un peu de marge à l’arrivée. Ce petit changement me convient très bien !

Vient ensuite la distribution du matériel de kayak, grand moment ! Nous essayons successivement nos salopettes en polaire (vite surnommées « les babygros »), les chaussons en feutre et les combinaisons imperméables. Joli look de pingouin ou de cosmonaute, selon les avis ! La vérification minutieuse des combinaisons et les petites réparations occupent la fin de la matinée.

Tout le monde descend ensuite en « ville » (comprendre : à Longyearbyen) pour compléter les équipements et faire quelques achats. Il pleut sans discontinuer, on se croirait en novembre dans le Nord.

De retour à la guesthouse, nouvel essayage des combinaisons, mais cette fois sous la douche afin de vérifier leur étanchéité : les pingouins rouges (ou noirs) déambulent dans le couloir !

La dernière partie de la journée est consacrée au transport du matériel collectif, des réserves de nourriture et des kayaks jusqu’au port. La quantité de matériel à embarquer est impressionnante, on se demande comment tout cela pourra rentrer dans les kayaks…

Nous sommes de retour à la guesthouse vers 23h : repas, emballage des affaires personnelles dans les sacs étanches (on y met finalement plus de choses qu’il n’y parait, en tassant bien !), écriture des cartes postales… et dernière nuit en terre civilisée.

Après un premier vol Paris-Oslo et 8 h d’attente dans l’aéroport d’Oslo, nous nous envolons à 20h40 pour Longyearbyen, Svalbard, sous un beau soleil.

Peu après le décollage, le temps se gâte et nous volons au dessus d’une épaisse couche de nuages. Ce n’est pas cette fois que nous reverrons le Cap Nord ! Environ 3h plus tard, le commandant de bord nous annonce la descente sur le Svalbard. Quelques minutes de traversée des nuages et nous découvrons enfin notre destination…

Il est près de 23h30, mais bien sûr il fait jour, et la vision est à couper le souffle. C’est presque irréel : la mer, de hautes montagnes sombres encore en partie enneigées et coiffées de nuages, et surtout d’immenses glaciers qui plongent dans la mer. Impressionnant !

Nous atterrissons sur le petit aéroport et faisons la connaissance de notre guide, Pierre, ainsi que des autres membres du groupe : Sylvaine, Jean-Pierre, Olivier, Jean-Christophe et Jacques. Une autre participant, Agnès, arrivera par le prochain vol. Avec nous deux en plus (Arnaud et Delphine), nous serons donc 9 !

Pierre nous emmène jusque notre « guesthouse » à Nybyen, un peu à l’écart de Longyearbyen. Il s’agit d’anciens logements de mineurs reconvertis en chambres d’hôtes. Nous passons notre première nuit au Svalbard. Il est 1h du matin, et le soleil brille.